lundi 19 janvier 2015

Les managers et la RSE : 7 leviers pour changer la donne



Pour concevoir une stratégie de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) efficace et pérenne, il faut s’assurer de son portage par la ligne managériale. C’est le management qui permet de mettre la RSE en musique, c’est-à-dire en actes. Sans quoi elle risque de rester un ensemble plus ou moins cohérent d’initiatives, étranger à la stratégie de l’entreprise, indifférent à ses métiers, extérieur au quotidien des salariés.

Cette déconnexion, qui est le lot de beaucoup d’entreprises, explique pourquoi la RSE est encore loin d’imprégner la réalité du quotidien dans les organisations alors que, par ailleurs, 80% des PDG des grandes entreprises mondiales considèrent « l’engagement en responsabilité sociale comme un avantage compétitif indispensable pour leur entreprise »[1].
Aligner le management avec la RSE 
La prise en compte de la RSE par le management est donc un enjeu essentiel. C’est pourquoi nous avons choisi d’explorer ce sujet difficile lors d’une convention organisée par la Maison du Management le 10 décembre dernier, à laquelle ont participé une cinquantaine de managers, de directeurs de la RSE ou du développement durable.

Nous avons eu grand plaisir à co-animer cette convention car elle a mis en action la marque de fabrique de la Maison du Management, c’est-à-dire ce qui en fait un lieu (et un collectif) à la fois apprenant et inspirant :

  • Aborder la problématique avec les lunettes du manager : c’est en faisant preuve d’empathie mais aussi d’exigence que l’on peut véritablement comprendre ses envies, ses motivations, ses contraintes et apporter des réponses pertinentes ;
  • Solliciter des experts de profils très différents afin de faire jaillir des idées par la confrontation des convictions et des expériences professionnelles ;
  • Faire en sorte, par une approche de travail en sous-groupes, que les participants contribuent à l’élaboration des solutions (co-construction) dont ils deviennent ensuite les porteurs au sein de leur organisation.

Nous proposons ci-après une synthèse de quelques-unes des idées issues de cette convention.

Sensibiliser et former la ligne managériale

La RSE reste un sujet complexe, multiple et mouvant au gré de l’actualité. Il prend des dimensions particulières en fonction des secteurs économiques. La majorité des managers en poste n’a pas suivi de formation initiale spécifique sur le sujet. Il est nécessaire de créer un socle de connaissance minimum pour l’ensemble des acteurs (partager une grammaire commune) puis de développer des compétences spécifiques métier par métier (gouvernance, achats responsables, etc.). Cela nécessite, sous l’impulsion de la DRH et des Universités d’entreprise, de mener des opérations de sensibilisation génériques (par exemple via le e-learning), d’insérer la RSE dans les cursus d’intégration et les modules de formation « métier » et de s’appuyer sur les dispositifs de communication interne (affichage, newsletter, intranet, réseaux sociaux) pour faire vivre la culture RSE dans la durée.

Démontrer le lien entre RSE et business

La RSE a longtemps été considérée comme une contrainte (condition du droit d’opérer), une façon de gérer des risques (raréfaction des ressources, etc.) ou de réparer des impacts. Il est temps de réaliser qu’elle est une opportunité de répondre aux attentes croissantes des clients et autres parties prenantes, de s’adapter aux évolutions du contexte économique (vers une économie fonctionnelle, circulaire, collaborative) et d’innover (inventer de nouveaux produits et services). Encore faut-il arriver à le démontrer avec des business cases probants, ce qui devient de plus en plus le cas comme en ont témoigné les intervenants de Manutan ou de Suez Environnement.

Insérer la RSE dans les différents projets de l’entreprise

Les managers sont confrontés à une multiplication des objectifs, des injonctions et des priorités qui leurs sont assignés. Si la RSE apparaît comme « un sujet à part», elle ne sera pas portée par la ligne managériale. Il faut donc chercher à intégrer les objectifs sociaux, sociétaux et environnementaux en amont, dès la conception des projets déployés. Prenons l’exemple d’un déménagement : c’est l’occasion de prendre en compte les normes de haute qualité environnementale pour le nouveau site, de se préoccuper de la compatibilité des locaux et des modes de travail avec le handicap, de concevoir des postes ergonomiques, de mettre en place un Plan de déplacement, de solliciter l’intelligence collective dans l’organisation des espaces, etc.

Intégrer la RSE dans les process de gestion des RH

Cette approche permet de montrer que le fonctionnement de l’entreprise se met au diapason de la RSE et de donner une forte visibilité à cette dernière. Il peut s’agir de prendre en compte de nouveaux critères dans le recrutement ou l’évaluation annuelle, de revisiter les référentiels de compétence ou les chartes managériales. Il peut aussi s’agir d’introduire des objectifs RSE dans le calcul d’une part de la rémunération variable des dirigeants et des managers (ou un compartiment des critères de l’intéressement / participation). Danone, Orange et Pernod-Ricard, qui font partie des groupes pionniers en la matière, ont partagé leur retour d’expérience[2].

Utiliser la RSE comme un ciment du projet d’équipe

Le manager est l’animateur du projet collectif de son entité. Il peut faire vivre la RSE non pas comme une approche séparée mais comme une partie intégrante de ce projet. Par exemple, les objectifs de diversité et d’égalité professionnelle peuvent venir nourrir son approche du recrutement, de la promotion et de la rémunération ; la responsabilité de son entreprise vis-à-vis de l’employabilité des salariés peut nourrir son approche de l’accès au plan de formation, etc. Le manager peut mettre en discussion à l’occasion de ses réunions d’équipe, la notion de performance sous ses aspects économiques, sociaux et environnementaux.

Faire de la RSE un outil d’intégration de la génération Y

Les générations nouvelles n’ont pas la même hiérarchie de valeurs que les précédentes. Une étude menée dans 17 pays sur les « Millennials », la génération née entre 1980 et 1995, vient encore de le démontrer : 83% de ces jeunes – qui représenteront 75% des salariés dans le monde en 2025 – estiment que les entreprises doivent s’impliquer dans les enjeux sociétaux ; 72% soutiennent et recommandent les entreprises qui contribuent à résoudre des problèmes sociétaux et 69% veulent que les entreprises et les employeurs facilitent leur propre implication personnelle (en tant que consommateur ou salarié) dans ces enjeux[3]. Il n’y a plus de cloison entre les rôles: le salarié est aussi un citoyen, un consommateur, parfois un actionnaire de son entreprise,… Le manager peut innover en faisant plus explicitement appel à chacun de ces rôles.

Créer un moment de cohésion et de célébration autour de la RSE et de ses apports

Des exemples montrent qu’il existe une corrélation importante entre d’une part les valeurs et la stratégie RSE de l’entreprise et d’autre part le niveau d’engagement des collaborateurs. Renforcer l’intégration de la RSE dans le travail quotidien de tous est essentiel et le manager a un rôle clé à jouer, y compris par exemplarité. Toute occasion permettant de célébrer les performances RSE de l’entreprise avec tous les collaborateurs contribue à l’amélioration de la perception positive de tous sur la contribution citoyenne de l’entreprise à la société et augmente la fierté de travailler pour une entreprise responsable. Organiser une journée de la responsabilité ou des périodes de sensibilisation à des axes prioritaires de la politique RSE sont des pratiques à développer. Ces moments sont particulièrement réussis si tout le management est impliqué sincèrement et visiblement. L’exemple de Pernod Ricard avec l’organisation d’une journée de la responsabilité qui mobilise l’ensemble des 18 000 collaborateurs le même jour dans plus de 80 pays montre un impact très positif et 95% des employés souhaitent que cette journée soit renouvelée tous les ans.

Conclusion

La RSE est aujourd’hui confrontée à un déficit de crédibilité : elle s’affiche abondamment mais elle s’incarne peu. C’est en mobilisant la ligne managériale, « la cordée de la RSE », que les entreprises réussissent à prendre la voie d’une création de valeur durable mais aussi, comme l’affirme la Maison du Management, d’un développement motivant et inspirant.

Nous vous enjoignons, cher lecteur, à rester attentif aux prochaines initiatives de la Maison du Management en vue d’en faire bénéficier quelques-uns de vos managers…

André Hémard, Groupe Pernod-Ricard
Agnès Rambaud-Paquin, Des Enjeux & des Hommes
Martin Richer, Management & RSE

Pour aller plus loin :
Le site de la Maison du Management:    http://www.lamaisondumanagement.com
Le site RSE de Pernod-Ricard                http://pernod-ricard.fr/26/la-rse
Le site de Des Enjeux & des Hommes :  www.desenjeuxetdeshommes.com
Le site de Management & RSE :             http://managementRSE.blogspot.fr
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[1] D’après l’enquête “The UN Global Compact—Accenture CEO Study on Sustainability 2013”, February 2014
[2] Voir également le guide de l’Observatoire sur la Responsabilité Sociétale des Entreprises (ORSE), « Etude sur l’intégration de critères RSE dans la part variable des rémunérations des dirigeants et managers », juin 2012
[3] “People's Insights: The Future of Business Citizenship”, MSLGROUP study, December 2014

1 commentaire:

  1. Un autre bon levier de la RSE, surtout dans les grands groupes c'est la supply chain. > http://e-rse.net/une-supply-chain-plus-verte-une-priorite-pour-la-rse-des-grandes-entreprises-12055/

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